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Comment les innovations technologiques sont-elles utiles à la création de plats gastronomiques ?

Comment les innovations technologiques sont-elles utiles à la création de plats gastronomiques ?

Bérangère Chanel | 10/03/2025 08:51

De la cuisson sous-vide hier jusqu’à la cryogénisation aujourd’hui, les innovations en cuisine ont toujours autant intrigué qu’elles ont nourri la critique. La gastronomie n’a pas attendu l’intelligence artificielle pour vivre avec son temps.

De l’intelligence artificielle à toutes les sauces : pour gérer les stocks, pour réduire le gaspillage alimentaire, pour rendre une carte plus alléchante avec des photos gourmandes…. Même les métiers de la restauration sont concernés par cette révolution technologique. Mais, ils n’ont pas pour autant attendu l’IA pour puiser dans le meilleur des nouvelles technologies afin de les mettre au service de leurs établissements. L’utilisation d’appareils dits connectés ou intelligents ne date pas d’hier.

Hier, la cuisson sous-vide…

Prenez le Thermomix par exemple. Indispensable dans la plupart des cuisines professionnelles aujourd’hui, il était pourtant destiné à un usage domestique depuis son lancement en 1961 par la marque allemande Vorwek. En matière de techniques de cuisson, on ne peut manquer de mentionner la cuisson sous-vide, désormais un non-sujet dans la sphère gastronomique, alors que cette technique de cuisson développée par George Pralus dans les années 1970 a longtemps dû attendre d’en finir avec les critiques.

Après avoir mis au point sa technique dans les cuisines des frères Troisgros en prenant une terrine de foie gras comme cobaye, le chef cuisinier roannais a enseigné son savoir-faire à de futurs grands comme Michel Bras ou Alain Ducasse. « Hier soir, il était minuit lorsque j’ai fait partir en cuisson sous-vide des canettes » nous raconte Arnaud Viel, le chef du restaurant gastronomique Arnaud Viel, la Renaissance. Et de souligner « la technique sous-vide permet une réelle concentration des goûts et un maintien des textures hyper intéressant. Elle sert aux cuissons mais aussi à préparer des infusions ».

L’avantage n’est pas que gustatif. L’usage de la cuisson sous-vide s’intègre aussi dans une réflexion plus globale engageant désormais les cuisines professionnelles à mieux valoriser les matières premières et réduire les coûts énergétiques. « De cette façon, on optimise la consommation d’énergie » lance le chef trois toques. Dans sa cuisine normande, Arnaud Viel a aussi fait l’acquisition d’un Robotcoupe C40 qui permet d’extraire la quintessence de produits qui partent généralement à la poubelle : les cosses de petits pois, les barbes des coquilles St-Jacques… « Je réalise des consommés et des gels avec cette matière première qui contient beaucoup de goût » raconte le chef d’Argentan. De son propre aveu, c’est son fils, Arthur, actuellement membre de la brigade de Yannick Alléno au 1947 à Cheval Blanc de Courchevel qui lui a partagé la découverte. « Avec ce robot, le travail devient plus rapide et régulier » reconnaît-il, confiant que les découvertes des nouvelles innovations technologiques se partagent entre chefs.

Mais, avant de tourner le bouton de son C40, Arnaud Viel procède à une manœuvre que ses pairs n’auraient sans doute jamais imaginé : la cryogénisation. Comprendre : passer dans l’azote liquide une préparation culinaire afin de les soumettre à une température extrêmement basse. Chez le chef de La Renaissance, cette technique généralement associée à la cuisine moléculaire lui permet de récupérer le liquide chargé en goût. Inconnue au bataillon dans les cuisines des grands restaurants dans les années 70 et 80, la cryogénisation est apparue sous l’impulsion du célèbre chef espagnol Ferran Adria, dans son mythique restaurant catalan El Bulli. Des mousses qui disparaissent en bouche, des glaces aériennes, des sphères de fumée qui en mettent plein la vue… La cryogénisation a participé à faire de la gastronomie un spectacle instantané.

…et désormais l’impression 3D

« Tout l’objectif, c’est de rendre un plat mémorable. Une assiette doit être de qualité, c’est logique. Mais pour que les clients s’en souviennent, le visuel doit être impactant » analyse Sylvain Renzetti, le chef bordelais à l’univers singulier. Dans son restaurant Son’Restaurant, le lauréat du prix Jeune Talent Nouvelle-Aquitaine 2022 détourne des objets qu’il confectionne avec une imprimante 3D : une cocotte (comme celle en papier que l’on faisait enfant), une brique Lego, un marque-page intégrant une encre alimentaire… « Je me sers de la technologie pour assoir mon propos » insiste cet ancien rockeur. Le musicien reconverti signe volontairement une partition culinaire ludique, et assume donc d’intégrer du matériel que certains pourraient estimer superflu, comme ce « flavor blaster gun » que Sylvain Renzetti utilise pour créer une fumée de barbe à papa autour de son dessert imaginé sur le thème du Petit Prince.

Sylvain Renzetti.plat
©DR

« Tout l’enjeu, c’est de servir un aliment que les clients n’ont jamais mangé sous cette forme » reconnaît le jeune chef. Cette ouverture sur les innovations technologiques, Sylvain Renzetti l’a intégrée au moment du confinement à la lecture du livre de Charles Spence intitulé « Gastrophysique : une nouvelle science pour éclairer nos choix alimentaires ». « J’ai compris que tout n’avait pas encore été exploré et que la gastronomie d’aujourd’hui constituait finalement un art neuf datant des années 90 » résume la toque bordelaise.  

Des innovations technologiques en cuisine vraiment sans limites ? 

Chimique, sans goût, manquant d’émotions… On entend déjà les critiques de ceux qui s’opposeraient à cette insurrection des nouvelles technologies au sein des cuisines professionnelles. « Notre métier, c’est d’aller chercher le goût. Ces innovations nous simplifient des tâches. Mais, il ne faut pas compter sur elles pour croire qu’on réalise de la "nouvelle cuisine" » tempère Arnaud Viel, qui se défend d’être un adepte de la cuisine moléculaire sous prétexte qu’il utilise le processus de cryogénisation.

À Bordeaux, Sylvain Renzetti considère même que ce serait une erreur d’envisager la cuisine comme une démonstration technologique. « La limite, c’est que ce ne soit pas chimique ! » conclut-il.

Le point de vue d’Anne-Sophie Pic (4 toques)

Le matériel de pointe et les équipements de haute-technologie sont-ils devenus indispensables pour accompagner la création gastronomique ? 

Anne-Sophie Pic : Être en phase avec son époque ne signifie pas se laisser totalement dépendre de la technologie, mais savoir l’intégrer intelligemment pour faciliter le travail des équipes en cuisine. Les nouvelles technologies sont un atout précieux en cuisine. Nous avons ainsi besoin d’allier technologies de choix pour nous aider à repousser les limites de la créativité culinaire.

Dans mon laboratoire à Valence, le Pic Lab, j’ai choisi les équipements de la marque suisse VZug pour leur grande précision et leur esthétisme. Cela concerne notamment des fours à ventilation et vapeur offrant des précisions de températures singulières. Ce sont des outils qui nous permettent de contrôler précisément la cuisson, de préserver les saveurs et d’explorer différentes textures.

 

 

Il faut intégrer les nouvelles technologies, de la même manière que la cuisson sous-vide et la cryogénisation alors même qu’elles ne faisaient pas consensus au début ? 

A-S P : C’est avant tout le processus qui est intéressant. Concernant la cuisson sous-vide, je n’ai retenu que les aspects qui me semblaient pertinents au métier de cuisinier. J’ai détourné certains usages afin que cette technique s’intègre harmonieusement à la personnalité de ma cuisine. La cuisine, comme tout art, évolue avec son temps et, en tant que chef, il est important de s’adapter aux outils et aux savoir-faire modernes. On ne doit pas les adopter parce qu’elles sont tendances, mais parce qu’elles enrichissent l’expérience culinaire. Les nouvelles technologies ne remplacent pas le travail et les gestes, mais les complètent.  

Dans ma réflexion autour des sauces par exemple, j’utilise le ROTOVAP un distillateur à basse température, qui me permet d’obtenir des compositions plus légères, et plus concentrées en arôme. C’est un outil mécanique qui me permet de distiller, et donc de ne pas brûler les saveurs. Il permet de révéler la profondeur aromatique des ingrédients tout en conservant leurs propriétés. La distillation permet d’obtenir des concentrés plus purs et légers, ce qui est particulièrement intéressant pour les plats végétaux. L’utilisation est double : on peut exploiter le concentrat d’un jus de légume tout en utilisant le distillat pour une boisson.

Le danger n’est-il pas de servir des plats trop techniques qui empêchent l’émotion ? 

A-S P : oui, il y a un risque si l’outil devient exclusif et si l’on s’appuie uniquement sur lui. En revanche, il reste bénéfique lorsqu’il est utilisé avec parcimonie, pour une partie du plat et non dans son ensemble. Les impressions 3D permettent de pousser encore plus loin le visuel d’un plat en apportant une cohérence entre l’intention, le visuel et le goût. Elles participent à enrichir l’expérience sensorielle, à décupler l’émotion ressentie.

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