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Les endives pleine terre de la Ferme Chauwin

Les endives pleine terre de la Ferme Chauwin

Benoit Gaboriaud | 30/11/2023 15:18

Surnommée la racine du diable, l’endive fait la fierté des Hauts-de-France. Non loin de Cambrai (Nord), le producteur Christophe Chauwin est l’un des rares à ne pas avoir cédé à l’hydroponie intensive. Cet héritier d’un savoir-faire établi depuis trois générations perpétue la tradition d’une endive de pleine terre, désormais labellisée.

Pour la petite histoire, c’est un Belge, Monsieur Bréziers, qui découvre l’endive. En 1850, pour payer moins d’impôts, ce malicieux jardinier dissimule des pieds de chicorée dans sa cave. Quelques semaines plus tard, surgissent de terre de petites plantes blanches fuselées. L’endive était née !

Aujourd’hui, la France en est le premier producteur au monde, devant les Pays-Bas et la Belgique. Ce succès, nous le devons aux Hauts-de-France, dont sont issus 95% de la récolte nationale, mais aussi à l’hydroponie, qui s’est largement démocratisée dans les années 1980. Près de 98% des endiviers ont cédé à cette facilité.

Avant l’arrivée de cette plantation hors sol, tous les paysans du Nord-Pas-de-Calais travaillaient l’endive en pleine terre. Même le curé du village y contribuait. La culture traditionnelle du chicon – comme on appelle encore l’endive dans la région – suscite un regain d’intérêt, notamment grâce à quelques passionnés. À l’image de Christophe Chauwin, qui souhaite transmettre son savoir-faire à ses enfants pour que l’endive de terre et ses parfums propres ne tombent pas dans l’oubli.

Une affaire de famille

Agriculteur de père en fils, cet exploitant est à la tête de la Ferme Chauwin, fondée par son grand-père durant l’entre-deux-guerres à Épinoy. Fervent défenseur des traditions, il extrait les saveurs du terroir pas-de-calaisien à travers la production de fruits et légumes : la fraise, la pomme de terre, l’asperge blanche… et l’endive. Cette dernière nécessite un travail de tous les diables, d’où son surnom. Les Chauwin la cultivent exclusivement en terre depuis 1947, afin d’en préserver le croquant et le parfait équilibre entre amertume et goût sucré.

Pour y parvenir, il s’est concentré sur les variétés excellence, alliance, topscore, ombline et flexine. D’avril à mai, il sème les différentes graines de chicorée sur ses propres parcelles, où il alterne avec le blé. Au bout de quelques mois, elles donnent naissance à des racines, lesquelles sont arrachées entre mi-octobre et mi-novembre, pour être conservées dans un état végétatif, dans des chambres froides, à une température proche de 0 °C.

Au fil du temps, entre octobre et mars, il repique les jeunes plants. Les agriculteurs ont bien retenu la leçon de Monsieur Bréziers : durant cette période de forçage, les racines, enterrées dans un sol chauffé et arrosé deux à trois fois par semaine, sont plongées dans l’obscurité totale. Apparaissent alors des feuilles blanches, qui forment au bout d’une vingtaine de jours l’endive que nous trouvons sur les étals uniquement les mois d’hiver.

Où trouver les endives de pleine terre de la ferme Chauwin ?

Christophe Chauwin vend les siennes sur le marché de Cambrai, chez des confrères, dans des supermarchés locaux ou dans sa propre boutique, nichée dans sa charmante ferme en brique rouge. Il y propose aussi quelques recettes autour de l’endive : des gratins, des tartes ou des soupes. Une manière savoureuse de redécouvrir ce mets, dont l’amertume a marqué tous ceux qui ont fréquenté les cantines scolaires.

Afin de défendre sa culture – dans les deux sens du terme –, Christophe Chauwin cotise à l’Association des producteurs d’endives de France (Apef), basée à Arras. Une évidence selon lui, car, depuis 2008, elle soutient les petits producteurs soumis aux grands enjeux de l’agriculture moderne. Elle investit également dans la recherche pour proposer de nouvelles variétés, plus rentables, et œuvre pour la promotion de l’endive. Grâce à cette structure, mais surtout à l’association Endive de pleine terre, le ministère de l’Agriculture a décerné en 2015 le Label rouge à l’endive de pleine terre. Une victoire pour Christophe Chauwin, dont le savoir-faire est désormais reconnu, encadré et encouragé.

L’endive pleine terre labellisée

L’endive Label rouge se distingue de l’endive issue de l’hydroculture par une forme plus trapue et moins allongée, une texture plus ferme au toucher et un goût en bouche plus subtil et prononcé. Il ne faut pas confondre ce label avec l’endive rouge, dite carmine, anecdotique mais festive, souvent mise sur la table pour des occasions particulières.

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