Manufacture Digoin : plus d'un siècle de savoir-faire en Bourgogne
Depuis 1875, la Manufacture de Digoin façonne la terre de Bourgogne en objets du quotidien. Après avoir traversé les affres de deux liquidations et trois reprises, cette institution parvient à renaître de ses cendres.
Il est des noms qui résonnent comme une mélodie familière dans le patrimoine français. La Manufacture de Digoin – née Grès et Poterie de Digoin – installée au bord du canal de la Loire depuis 1875, incarne bien davantage qu’un simple atelier de céramique. Cette maison bourguignonne est le symbole d’une résilience unique dans l’artisanat français, traversant crises et époques sans perdre ce qui fait sa force : un savoir-faire ancestral profondément ancré en Bourgogne. Aujourd’hui, elle renaît une fois de plus, portée par une vision moderne et créative, tout en restant fidèle à ses racines, continuant ainsi d’enchanter tables et cuisines d’ici et d’ailleurs.
Le renouveau d’un savoir-faire historique
Il suffit de poser le pied à Digoin, petit bourg paisible de Saône-et-Loire, pour comprendre que la manufacture fait partie de l’ADN de la ville. Ses cheminées de briques rouges se détachent à l’horizon, rappelant la grandeur passée d’un site qui a fait vivre toute une région. Depuis 1875, cet atelier transforme la terre de Bourgogne en objets du quotidien, des cruches aux pots en grès, façonnés avec une minutie et un savoir-faire qui se transmettent de génération en génération.
Le grès de Digoin, réputé pour sa résistance et son imperméabilité, a d’abord servi à fabriquer des récipients pour l’agro-alimentaire. Dans les années 70, la manufacture produisait jusqu’à 100 000 gobelets par mois, notamment pour la crème de roquefort. Mais avec l’arrivée du plastique, la production a décliné, menaçant de faire disparaître ce savoir-faire. Pourtant, comme une poignée de terres cuites qui résistent aux éléments, elle a survécu à l’épreuve du temps et des changements économiques.
Un nouveau souffle sous la houlette de Thierry Benhaim
À plusieurs reprises, l’usine a frôlé la fermeture définitive, subissant deux liquidations judiciaires. Mais chaque fois, elle a trouvé un souffle nouveau. Quand on demande à Thierry Benhaim, l’actuel propriétaire, ce qui l’a poussé à troquer sa vie d'avant pour une usine de poterie dans la Vallée de la Loire, il confie "C’est ce besoin de s’ancrer dans quelque chose de tangible, de terrien, qui m’a poussé à croire en sa renaissance". Sa vision ? Continuer de faire vivre les fours et offrir à Digoin une nouvelle place dans le paysage de l’artisanat d’excellence.
Aujourd’hui, la manufacture ne se contente pas de rééditer ses modèles historiques. Certes, on retrouve les fameuses terrines en grès, les pichets et autres cruchons emblématiques, mais le véritable renouveau vient de l’exploration de nouvelles formes et couleurs. Des nuances comme le "terre battue" ou le "jaune vif " viennent enrichir la palette, et la modernité s’immisce dans chaque nouvelle création. Pourtant, chaque pièce reste fidèle à ce qui a fait la renommée de Digoin : des objets simples, élégants, et intemporels.
Parmi les découvertes étonnantes lors de la reprise, une statuette de la Vierge à l’enfant, cachée dans un recoin de l’usine, a refait surface. "C’était comme retrouver un trésor," confie Benhaim. Cette pièce unique a été présentée lors du salon Maison & Objet en septembre 2024, symbole d’une redécouverte des archives de Digoin, mais aussi de son lien indéfectible avec son histoire.
Un futur créatif pour la Manufacture de Digoin
Et l’avenir ? La manufacture ne compte pas s’arrêter là. "Nous avons la volonté de faire de Digoin un véritable lieu de création" précise Thierry Benhaim. L’idée de transformer l’usine en un campus pour les métiers de la céramique d’art fait son chemin. Des résidences pour potiers, des collaborations avec des designers, et même des chefs qui utiliseraient la vaisselle en grès pour sublimer leurs créations culinaires… tout cela semble possible dans ce lieu où la tradition et l’innovation ne sont jamais en conflit.
Les icônes de Digoin : des objets cultes du quotidien
Les produits de la Manufacture de Digoin sont devenus de véritables symboles dans les foyers français. Qui n'a pas vu sur une étagère de cuisine ces fameux pichets en grès au design intemporel, un saladier coloré, une terrine traditionnelle, un pot à ustensiles ? Focus sur 3 produits emblématiques de la marque qui ont su conquérir le cœur des amateurs d'art de la table.
La terrine à bec
À l'origine, cet ustensile servait aux apothicaires, qui s’en servaient pour concocter leurs potions magiques – ou tout du moins, leurs préparations pharmaceutiques. Mais, les fromagers, jamais à court d’idées, ont détourné l’objet pour faciliter la préparation de leurs précieux fromages, le bec étant parfait pour évacuer le petit lait. Et comme si cela ne suffisait pas, cette "terrasse à bec" a aussi trouvé sa place dans nos traditions culinaires françaises. Du riz à la cannelle, appelé "Teurgoule" en Normandie au tian de légumes provençal, elle a su se rendre indispensable. Bref, un objet multi-usages !
© Digoin
Le pot à vinaigre
À la fin du XIXᵉ siècle, en France, fabriquer son propre vinaigre était une affaire de famille, presque aussi commune que de faire son pain. Plutôt que de gaspiller les fonds de bouteilles de vin ou de cidre, on les versait dans un pot en grès, un récipient conçu pour durer – imperméable et robuste. Chaque maison avait sa propre petite recette de vinaigre, et les possibilités semblaient infinies. Un brin de thym par-ci, une gousse d’ail par là, sans oublier une touche de piment, des baies roses ou même une pointe de truffe pour les plus audacieux. Ce pot, qui pourrait passer pour banal, devenait l’allié des cuisines créatives. Cerise sur le gâteau : un petit robinet en buis français, vient parfaire l’ensemble, accompagné d’un bouchon en liège.
© Digoin
La terrine animalière
En 1413, l’humble "terrine", descendant direct du mot "Terrin" signifiant "de terre", fait son apparition dans les cuisines françaises et devient un objet indispensable : à la fois pour cuire et conserver viandes et autres mets délicats, le tout sous un couvercle bien scellé. Au XVIᵉ siècle, les terrines s’invitent à la table des nobles : pâté de bécasse au bec doré, chapon, sarcelle ou encore venaison.
© Digoin
Si cette terrine est restée un incontournable jusqu’à nos jours, c’est aussi grâce à ses propriétés incomparables. Le grès utilisé, cuit à des températures extrêmes, est totalement vitrifié et non poreux, ce qui garantit qu’aucune odeur ne se transmet.
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