Le choix de la gastronomie
Ils sont à peine trentenaires et ont bien souvent acquis un important bagage dans de grandes et belles maisons multitoquées. Ils ont aujourd’hui ouvert ou dirigent leur restaurant en faisant le choix de la gastronomie. Gault&Millau propose une série d’entretiens avec de jeunes chefs dont la démarche prouve que la haute cuisine fait encore rêver, mais aussi que la rigueur et l’ambition sont également un moteur pour certains de ceux qui se lancent dans ce métier. Continuons avec Édouard Chouteau, du restaurant 3 toques La Laiterie, à Lambersart.
Il se dit que la haute gastronomie serait boudée par la jeune génération – de chefs et de clients –, mais certains tentent pourtant de renouveler le genre. Et font le choix d’une cuisine audacieuse, technique et française, avec, en salle, le retour de la nappe blanche, d’un art de la table raffiné, d’un service attentif et appliqué. En plus de s’engager à fond dans leur métier, ces équipes entendent le pratiquer avec les valeurs humaines, sociales et environnementales requises aujourd’hui.
La Laiterie, l’un des plus anciens restaurants de la région lilloise – bientôt 120 ans –, est une institution qui a connu de nombreuses vies et qui, depuis 2020, entame un nouveau chapitre de son histoire avec un jeune chef : Édouard Chouteau. À moins de 30 ans, il ne se contente pas de diriger la cuisine, mais gère l’entièreté de l’établissement, mettant son énergie au service de sa vision du restaurant gastronomique actuel.
Son premier contact avec le restaurant, c’est d’abord avec celui de ses parents, puis avec L’Amphitryon et Henri et Joseph, deux institutions de Lorient, là où il a grandi et commencé son apprentissage. Viennent ensuite les rencontres, les livres aussi… « Il y en a un qu’on m’avait offert et que j’ai lu à cinq ou six reprises, de manière chaque fois différente : Voyage en trois étoiles, de Jean-François Mesplède. J’en parle souvent parce que c’est un livre dans lequel tous les grands chefs racontent comment ils ont fait pour en arriver à ce niveau. Je trouvais bien plus intéressant de lire l’histoire de leur vie que de m’arrêter à une ou deux recettes. C’est ça qui me passionnait vraiment, cette ambition d’aller plus loin que les autres. » Après une expérience de sous-chef au Clarence, puis au Pavillon de la Reine, comme chef de cuisine sous la houlette de Mathieu Pacaud, il file vers le Nord rejoindre une Laiterie en quête d’un nouveau souffle.
C’est en puisant dans les fondamentaux de la grande cuisine française qu’Édouard Chouteau trouve sa signature, le vocabulaire à partir duquel il va composer, avec les produits de la région, son récit culinaire. « Il n’y a pas, selon moi, de grande cuisine d’auteur. Il n’y a qu’une interprétation. Mon but est d’y apporter, du début à la fin, une cohérence. En respectant notre identité, et notre époque aussi, car il faut quand même s’inscrire dans l’air du temps. Ma vision, c’est avant tout d’imposer les produits avec lesquels on va travailler. À quel moment, à quel rythme, dans quelle proportion… Et, en fin de compte, je pense que c’est ce qui forme notre ADN », explique-t-il.
« Je ne crois pas qu’il faille inventer une recette pour offrir une expérience singulière et unique, poursuit le chef. J’aime bien cette idée de haute gastronomie, parce que, pour les gens qui viennent ici, l’événement est de haute importance. Nous devons justement être à la hauteur, de l’anniversaire ou de la demande en mariage, du contrat qui va être signé, du premier repas officiel d’un couple… Les attentes de nos clients doivent aussi être les nôtres. »
Se voir confier les rênes d’un restaurant comme La Laiterie par un propriétaire – Pascal Boulanger, dirigeant d’un groupe spécialisé dans l’immobilier et la propreté – qui lui donne carte blanche est une occasion rare pour un jeune chef. Un défi autant qu’un risque. « C’est vrai que j’ai des copains qui sont restés sous les ordres cinq ou six ans de plus que moi. À 32 ou 33 ans, on a certainement une autre maturité. Je regrette même parfois de ne pas avoir été plus loin. Je me dis que, techniquement, ou sur certains points de logistique, j’ai encore quelques petites lacunes… Mais bon, ce qui est cool, c’est que ma fraîcheur est encore intacte et que je n’ai pas été formaté. Après avoir fait dix ou douze ans, par exemple chez Éric Frechon, c’est peut-être plus difficile quand on ouvre son restaurant. »
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