L’art d’accorder le thé et le fromage selon Carine Baudry
Boire du thé à table, rien de très original, du moins en Asie. Faire des accords plats et thés, comme on le ferait en sommellerie, c’est déjà moins courant. Mais le faire avec les fromages voilà qui n’est pas banal. Et pourtant, ce serait peut-être là l’accord parfait.
Un morceau de fromage et une tasse de thé… C’est la piste qu’explore l’experte en thés Carine Baudry, qui a mis sa grande connaissance au service d’accords qu’elle propose à des chefs et sommeliers comme Sébastien Vauxion au Sarkara de Courvevel ou Thierry Marx chez Onor. Elle vient de le faire également pour l’hôtel Royal Évian, qui propose désormais un tea-time Cheese & Tea.
Des pairings inspirant à reproduire facilement chez soi en suivant ses conseils.
Qu’est-ce qui vous a mis sur la piste de ces accords ?
Carine Baudry : Il y a des années, j’ai commencé par faire des ateliers thé, vin et fromage. J'avais invité le vin parce que c'était peut-être trop audacieux de le faire seulement avec les fromages. J’adore le vin, j’adore le fromage mais je ne suis jamais totalement emballée par un accord vin et fromage. Ma formation m’a donnée une approche sensorielle, et je me suis d’abord dit : le thé c'est tiède et cette chaleur invite le fromage, fait fondre la matière grasse et du coup fait exploser ses arômes. Le thé, c'est un peu le canapé dans lequel se love du fromage !
Quels sont donc les accords qui fonctionnent bien ?
C.B. : J'ai abordé ces accords en suivant la piste des odeurs et des d'arômes. C'est intéressant par exemple, d'associer un jeune comté, avec des thés qui ont eux aussi des notes fleuries et végétales, elles vont rehausser le côté un peu lacté, beurré, fruits à coque du fromage. Et inversement, le gras du fromage et son côté lacté va aussi souvent rehausser le côté hyper floral du thé. Un Darjeeling de printemps, par exemple, ou un thé blanc, mais plutôt assez vif, du Népal… le thé, arrondi par la matière grasse devient beaucoup plus fleuri et moins râpeux. En revanche, si on veut aller sur un comté mature, avec une texture un peu plus granuleuse, une salinité plus marquée, avec des notes de fruits secs presque torréfiés, on peut même rester dans la même famille des Darjeeling, mais sur les récoltes d'été ou d'automne qui poussent l'oxydation. Pour les chèvres, c'est bien d'avoir des notes douces, des textures un peu onctueuses et pas trop charpentées, donc des thés verts comme des Oolong pas trop oxydés. Mais on peut aussi y aller par contraste avec des Oolong torréfiés avec des notes légèrement pralinées, toastées et du coup, ça rajoutera une note au fromage.
©GGardette
Et sur les pâtes fleuries type camembert... ou même des fromages puissants ?
C.B. : Sur le camembert, j'adore mettre des thés un peu torréfiés. Comme le hojicha, un thé vert torréfié du Japon. C'est très sympa parce que ça enlève le côté un peu animal du camembert et rehausse son côté noisette. Les pâtes persillées, c’est plus compliqué. En particulier le roquefort, parce qu'il a de l'acidité. Sur les bleus, je joue sur le côté crémeux et lait caramélisé du blanc en les accordant avec un thé noir assez doux, un peu malté, vanillé mais pas aromatisé. La raclette et le thé, c'est super également ! Avec un thé noir du Népal, mais aussi un thé blanc. Un point important : le fromage avec le thé, ça se digère bien mieux.
Une fois, ces accords établis, testés et approuvés, comment les faire connaître aux professionnels comme au grand public ?
C.B. : Je fais des ateliers, je participe à des évènements. J'ai proposé un accord thé-fromage aux 500 convives du dîner caritatif de la Tablée des Chefs. Je travaille actuellement sur un livre avec la photographe Corinne Jamet Moreno Ruiz, nous cherchons un éditeur.
Je travaille aussi sur un projet de thé proposé en bouteille et servi dans un verre à vin.
C'est assez bluffant parce à table dans un restaurant, on est socialement guidé par le rythme et le code du vin. Et quand on ne boit pas d'alcool, on peut se sentir à l’écart, on n'est pas servi avec le même verre et le même rituel.
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