Le domaine Castéra, la passion jurançon

« J'entame cette année mon dixième millésime, le temps passe vite ! » s’exclame Franck Lihour, qui a pris la suite de ses parents Christian et Pierrette Lihour à la tête du domaine Castéra en 2014. La famille l’a acquis en 1895, mais l’histoire de ce domaine en appellation jurançon remonte à 1743. Le jeune vigneron a d’abord souhaité découvrir d’autres régions et pays viticoles avant de s’installer : « Je désirais acquérir une vision large du monde du vin. Je suis donc parti, après mon BTS viticulture-œnologie, en Corse, en Afrique du Sud ou dans la Napa Valley. Ces expériences m’ont enrichi et je suis revenu au domaine avec des idées plein la tête. »

Le jurançon sec a le vent en poupe

Jurançon est une appellation où la polyculture est ancrée depuis des siècles : « Jurançon est un vignoble en piémont, les vignes sont positionnées en haut des coteaux et les autres terroirs sont réservés à de l’élevage ou à des céréales. Nous avons l’avantage de vivre avec le bon sens paysan depuis des siècles et de contribuer à maintenir un écosystème durable. »

Franck Lihour fait partie d’une nouvelle génération qui sait tirer la quintessence des cépages emblématiques du jurançon, le petit et le gros manseng, et de leurs terroirs : « Notre appellation est connue pour la production de vins liquoreux de grande qualité et nous en sommes fiers, mais nous créons aussi de très bons vins secs. » En effet, malgré sa faible dimension – environ 125 hectares –, le jurançon a su aussi se faire une place auprès des amateurs grâce à de très beaux vins secs : « Sur les cinq dernières années, on voit que le niveau de nos vins a évolué qualitativement et cela coïncide avec des pratiques culturales plus propres. Et par une évolution de la consommation, qui tend à se détourner des vins liquoreux. De mon côté, je me suis orienté sur des vins de terroirs plus purs et identitaires. »

Sur la carte du Pré Catelan

Le domaine Castéra est surtout distribué en France par le biais d’un circuit de cavistes et de restaurateurs : « J'ai eu une expérience en tant que caviste et je suis convaincu que c’est le meilleur moyen de faire découvrir des vins comme les nôtres, qui ne sont pas connus du grand public. Il nous faut des prescripteurs comme eux. » Franck Lihour est aussi très fier de voir certaines de ses cuvées présentes sur de belles tables gastronomiques : « On peut aussi bien trouver nos cuvées au Pré Catelan [le restaurant parisien du chef Frédéric Anton, 19/20 et 5 toques Gault&Millau, NDLR] que dans de bons bistrots. Le plus important est de faire découvrir nos vins et d’apporter de l’émotion. Pour la petite histoire, j’ai récemment reçu un message Instagram d’un Américain vivant à Los Angeles qui a eu un coup de cœur pour l’une de mes cuvées et qui me demandait où la trouver. Je me lève chaque matin pour recevoir ce type de retour. » Les vins du domaine Castéra grandissent année après année et l’on a hâte de déguster le dixième millésime de Franck Lihour.

2023, un millésime compliqué

Quand ce n’est pas la sécheresse ou le manque d’eau, ce sont les maladies qui viennent gâcher les raisins, et c’est le cas du jurançon. Dans le Béarn, le millésime 2023 s’inscrit dans la lignée de 2022, avec une pluviométrie élevée (1600 ml) et l’apparition de mildiou dans les vignes. Le rendement moyen de l’appellation s’est élevé à 11 hl/ha en 2023, alors qu’elle permet d’exploiter jusqu’à 60 hl/ha pour les seuls jurançons secs. En conséquence, le domaine Castéra a décidé, au vu des faibles volumes produits, de ne réaliser qu’une seule cuvée d’assemblage de toutes ses parcelles. Le millésime 2023 se révèle néanmoins qualitatif, avec moins d’acidité qu’à l’habitude. Nous voilà rassurés. Il faudra néanmoins se dépêcher pour en dénicher.