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Chefs de père en fils…   Maximin, fils de Michel Hellio

Chefs de père en fils… Maximin, fils de Michel Hellio

Sylvie Berkowicz | 05/09/2022

Chefs de père en fils (ou en fille), un grand classique. Vocation ou mimétisme, c’est ce qui arrive quand, dès le plus jeune âge, on est plongé dans un milieu où les frontières entre vie professionnelle et vie privée sont floues. Que garde-t-on en tête et en cuisine de l’influence d’un père ? Comment respecter un héritage tout en s’émancipant ? Rencontre avec Maximin Hellio, aujourd’hui chef 3 toques à Deauville, et fils de Michel, emblématique chef breton.

Il a grandi dans le restaurant de ses parents Michel et Marlène Hellio : La Vieille Tour, à Plérin, près de Saint-Brieuc. Puis, après un passage chez Marc Haeberlin et Frédéric Anton, il les rejoint en 2008 à La Voile d’Or, à Sables-d’Or-les-Pins. La voie semble toute tracée pour succéder à un père à la solide réputation. En 2013, Gault&Millau lui décerne même le titre de Grand de Demain, alors que la famille a décidé de fermer le restaurant quelques mois plus tôt, en raison d’un conflit avec le propriétaire des murs. On retrouve quelques années plus tard le jeune chef dans son établissement de Deauville où, depuis 2016, il écrit maintenant sa propre histoire.  

 

Gault&Millau : Que signifie pour vous avoir eu un père chef ? 

Maximin Hellio : Avoir un père chef, c’est aussi pour moi avoir eu une mère en salle, et donc des parents chefs d’entreprise. Ils ont commencé sans formation, d’abord avec une cuisine simple, puis gastronomique, avec une partie hôtellerie. Ils se sont installés très jeunes et se sont faits tout seuls. Jamais je n’ai subi de pression de leur part pour faire ce métier ou travailler avec eux. J’ai épousé ce métier, parce que j’ai trouvé que c’était beau. J’ai vu un jour mon père dessiner une assiette, en l’occurrence un foie gras poêlé avec du porto, c’était en automne, avec des pommes, des fruits confits… et j’ai trouvé ça excessivement beau. Je me suis dit qu’il valait mieux choisir un travail manuel que de continuer dans des études pour lesquelles je n’étais pas forcément fait. 

G&M : Enfant, participiez-vous à la vie du restaurant ? 

M. H. : Notre appartement était juste à côté, avec une petite fenêtre qui donnait sur la cuisine. Tous les soirs, ma sœur et moi avions le droit de regarder entre 18h et 19h30, et puis on allait se coucher. Plus grands, on restait un peu plus tard et donc, forcément, on nous faisait goûter des choses. C’était magique et c’est ce qui nous a donné aussi l’envie de faire ce métier. On y voyait du plaisir, de la passion… moi, j’ai choisi la cuisine, et ma sœur élabore des gammes de pâtisseries véganes vendues en épiceries fines ou bio [Les Ateliers de la Veggisserie, NDLR]. 

G&M : Pensiez-vous alors que vous succéderiez à votre père ? 

M. H. : Jamais ! Comment succéder à un père comme le mien ? Ce n’est pas une question de gloire médiatique, c’est juste d’avoir eu un père qui a bien fait les choses. Comment dire… quelqu’un qui a été présent, qui a joué son rôle de père, son rôle d’entrepreneur et qui, malgré les récompenses, la notoriété, le fait d’avoir en Bretagne marqué des générations, ne se prenait jamais la tête. On dit souvent qu’on doit tuer le père pour devenir quelqu’un. Je n’aime pas du tout cette idée-là ! Quand il est tombé malade, j’avais 26 ans et je travaillais avec lui ; la seule chose qui m’intéressait, c’était de garder mon père ! L’entreprise aussi, qu’il souhaitait me transmettre, mais ma priorité c’était de garder ma famille. Je me suis acharné à le faire pendant des mois, pendant quelques années, jusqu’à ce qu’il me dise : je pense que tu peux ouvrir ton propre restaurant. Et ça, indépendamment du fait qu’il a été obligé peu après de fermer le sien.  

G&M : Que reste-t-il aujourd’hui de vos parents dans votre restaurant ? 

M. H. : J’ai réalisé, en créant cette maison, qu’elle était à l’image de la première maison de mes parents, à Plérin. Ils habitaient au-dessus du restaurant et parfois – ma mère le raconte souvent avec beaucoup d’humour –, en plein service, on voyait deux petits bouts de chou en salopette réclamer une histoire à leur maman. Il n’y avait pas de souci, les clients rigolaient et ça se passait super bien. Ce qui reste de tout ça ? En vérité, ça n’est pas forcément la cuisine en elle-même, parce que dans votre métier de chef vous avancez, vous évoluez. Ce qu’il reste de papa et maman, c’est leurs conseils avisés. Faire attention à tout, avoir l’œil sur tout, être bienveillant avec les équipes, se reposer quand on peut, et rester dans sa maison si on s’y sent bien…  

G&M : Que dit votre père au sujet de votre cuisine ? 

M. H. : Eh bien, déjà, il ne dit jamais rien ! Enfin si, une fois, et c’était au sujet de mon bouillon de crevettes. Ils sont venus déjeuner il y a six mois et ils étaient totalement sur le cul ! Il a demandé « Comment tu as fait ça ? » J’ai répondu « Mais tu dois savoir, non ? » Il me dit « Non, je ne sais pas… » En fait, chacun a sa vision, son niveau, et quand vous présentez à quelqu’un un plat qu’il n’a jamais mangé, et bien il ne sait pas comment c’est fait ! 

 

  • Maximin Hellio 

64, rue Gambetta, 14800 Deauville 

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