Voyage au cœur de la table
Il est des collaborations professionnelles aussi fortes que des mariages. Comment cette alchimie s’élabore-t-elle ? Rencontre avec le créateur Jean-Charles de Castelbajac, qui vient de signer « L’Archipel Sentimental », une nouvelle collection concoctée pour la Faïencerie de Gien. Attention, fragile…
Une rencontre peut être le fruit du hasard, un moment provoqué, une coïncidence… Dans le cas de la Faïencerie de Gien et du créateur Jean-Charles de Castelbajac, c’est un contact commun qui a joué les entremetteurs. « Thomas Dariel, qui dirige Maison Dada – avec qui j’ai d’ailleurs entamé récemment une autre collaboration –, m’a présenté à Yves de Talhouët, le président de la faïencerie, précise le styliste. J’apprécie ces rencontres avec des marques et leur univers, comme par le passé avec J.M. Weston, Ligne Roset, Fermob ou Pierre Frey. J’aime me confronter, marcher sur la glace de ces alchimies… »
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Le fruit de cette rencontre se nomme « L’Archipel Sentimental », une collection dévoilée en janvier à travers une mise en scène installée dans la boutique parisienne de la marque, à Saint-Germain-des-Prés, et proposée en même temps à la vente en ligne. Derrière cette bien étrange appellation se cache un travail complet, coloré et joyeux, à l’image de son créateur.
« L’idée de “L’Archipel Sentimental” est celle d’une table où chaque assiette est une île, où chacun va à la rencontre de l’autre, exactement comme dans cette collaboration, confie Jean-Charles de Castelbajac. Ainsi, au lieu d’utiliser mon bleu pour ces créations, j’ai changé pour celui de Gien, pour mieux laisser la marque infuser mon travail. Il me semblait que c’était davantage à moi de m’incliner vers leur teinte qu’à eux de venir vers la mienne. Cette couleur était notre lien, notre sang bleu… »
Le designer a ainsi composé une trentaine de dessins, en réalisant pour chaque modèle une bordure spécifique, comme un signe caractéristique, une signature. « Je me suis aperçu que mes créations se mariaient bien avec les motifs floraux du XIXe siècle ou les décors du XVIIIe de Gien », précise-t-il. Sa collection s’ouvre avec un grand plat intitulé « L’amour est fragile », en référence à la nature même des produits de faïence. Il décline ensuite ses ornements et couleurs sur une gamme de six assiettes plates et autant d’assiettes à dessert, mais également des plats, mugs, porte-cartes…
« J’avais envie de choses que je n’avais pas vues depuis longtemps, comme le serviteur muet, ce plat à plusieurs niveaux sur lequel on dispose des canapés ou des desserts et qui dégage beaucoup de poésie. J’ai aussi imaginé un papier peint, un sac cabas, des nappes, conçu des armoiries qui unissent nos deux maisons… »
« L’Archipel Sentimental » comporte une variation de motifs : une lune, des nuages, des mains, des visages, un oiseau, un château, un cœur, des étoiles… « J’ai dessiné comme des cartes de tarot, un peu ésotériques, des petites portes vers l’invisible. L’une d’elles me ressemble beaucoup. Elle représente un profil de garçon entouré de nombreuses mains. C’est une forme d’autoportrait qui exprime l’archipel de ma curiosité, note Jean-Charles de Castelbajac. Je retiens de cette collaboration un partage artistique, mais aussi humain. »
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Une suite à venir
L’histoire ne s’arrêtera sans doute pas là. Le créateur, qui par le passé a déjà travaillé avec des marques comme Deshoulières ou L’Ancienne Manufacture Royale (Maison Bernardaud), a repris goût aux arts de la table : « J’ai envie de poursuivre, indique-t-il. Je pense à quelque chose qui soit de la même dimension pour Gien et moi et qui nous ramène aux sources de notre alliance. Gien me donne envie de créer des couverts, des verres… Il existe un savoir-faire extraordinaire en France, et la manière d’en témoigner est de créer ensemble avec ces artisans. J’ai aimé imaginer une mise en scène, une ambiance musicale, pour présenter “L’Archipel Sentimental” en totale immersion… C’est à mon sens le prochain pas vers la gastronomie. Ce concept d’immersion, que certains chefs pratiquent déjà, m’intéresse beaucoup. L’idée de troubler le visiteur, comme quand, enfant, on nous installait dans un train fantôme pour la première fois, est à la fois terrible et délicieuse… »
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