Le wok à tout faire
Il est arrivé de Chine et a introduit les feux de l’enfer dans nos cuisines. Il saisit tout ce qui lui tombe dessus et concocte, le temps de dire ouf, une assiette colorée. Le wok a conquis l’Occident avec sa promesse de cuisine saine, ludique et ultrarapide : l’outil rêvé de fast food healthy.
Promenez-vous dans la vieille ville de Phnom Penh, de Hanoï ou de Bangkok : à chaque coin de rue, vous verrez des flammes jaillir des carrioles des vendeurs de street food et leur frôler le visage. Dans la seconde, vous sentirez cette caractéristique odeur de friture mêlée de parfums exotiques, si particulière à l’Asie. L’instrument qui trône désormais dans beaucoup de nos cuisines doit son nom à l’expression cantonaise wok hei (« souffle du wok ») et aurait été introduit en Chine durant la dynastie Han. Après s’être répandu dans toute l’Asie du Sud-Est, le wok a attendu la fin du XXe siècle pour traverser la Russie et l’Europe. Mais qu’avait-elle donc de spécial cette poêle, pour « griller » la politesse à toutes les autres et nous séduire à ce point ? Elle nous a fait de l’œil en nous prenant par les sentiments.
L’exotique ustensile – à ne pas confondre avec une sauteuse, et encore moins avec le terme anglo-américain « woke » – s’est imposé dans le paysage culinaire français en faisant miroiter une multitude de possibilités de cuissons et de préparations. Nous étions à la fin des années 1980. Véronique et Davina prêchaient l’aérobic pour garder la ligne. Cet accessoire large, léger et profond promettait de cuire les viandes avec très peu de gras et de préserver les vitamines des légumes : l’allié parfait pour un régime sain. Sympathique, mais passablement encombrant, le wok s’est imposé sur les plans de travail, y compris ceux des kitchenettes parisiennes où son large fond arrondi, en forme de calotte sphérique, et son manche surdimensionné le condamnaient à squatter non-stop la plaque de cuisson. Il faut dire que l’objet a des arguments : se jouant des sautés et de la cuisson à la vapeur, de la friture, du pochage, du braisage, de la saisie, des ragoûts, des soupes, du fumage et même de la torréfaction des noix, c’est le couteau suisse de la cuisson.
Son secret : il chauffe vite et fort, et sa forme évasée et profonde permet de mélanger avec vigueur. Qu’il soit en fonte ou en acier, l’essentiel est qu’il soit très mince, pour atteindre très vite la bonne température. Une cuillère à café d’huile et le feu au maximum : il n’y a plus qu’à jeter les morceaux de viande ou de légumes coupés courts et fins, une gousse d’ail, un peu de gingembre ou de citronnelle, et surtout à remuer sans mollir. La générosité du wok laisse le cuisinier libre de mélanger les ingrédients selon l’inspiration du moment, voire ce qui traîne dans le réfrigérateur. À peine le temps de se servir un verre et c’est prêt. Comme quoi on peut être le roi du fast food tout en restant vertueux.
Cet article est extrait de Gault&Millau, le magazine #8. Retrouvez le dernier numéro en kiosque ou sur notre boutique en ligne.
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