Villa René Lalique, la magnifique

Au cœur du parc naturel des Vosges, cette villa fut dessinée en 1920 par le maître verrier René Lalique, dont les œuvres Art nouveau ont fasciné le monde entier. Désormais propriété de Silvio Denz, la maison est un hommage vibrant à l’élégance et l’esprit avant-gardiste de son créateur. Un lieu unique, membre de la collection Relais & Châteaux.

Lydia Bacrie Publié le 04/12/2023 à 09:06

Sa façade à colombages s’inscrit dans la tradition, mais ses volets au bleu très contemporain signent déjà son goût pour l’avant-garde. Conçue en 1920 par René Lalique, cette villa a miraculeusement préservé l’esprit visionnaire de son créateur – pureté, maîtrise des formes et, bien sûr, omniprésence du cristal Art nouveau. Longtemps propriété de la famille, le lieu appartient aujourd’hui à l’entrepreneur suisse Silvio Denz, collectionneur d’art et passionné par la maison, au point, en 2008, de racheter la cristallerie à laquelle il redonne alors son prestige. Dans la foulée, Denz décide de transformer la villa en un refuge 5 étoiles, confiant son aménagement à Lady Tina Green et Pietro Mingarelli, architectes d’intérieur, mais surtout auteurs de collections de mobilier et d’accessoires, inspirés des motifs originaux de l’artiste.

Résultat ? Un sans-faute, où l’esprit du maître est partout. À commencer par les six suites exclusives, inspirées de ses créations. La chambre « Rose » s’illumine des tons poudrés chers à l’artiste ; « Dragon » dévoile son mobilier bleu nuit et ses jeux de lumière sur les lampes, tandis que la plus grande des suites (66 m²), baptisée « Masque de femme », décline les motifs du fantastique panneau de cristal éponyme créé en 1935 par René Lalique. Une atmosphère magique (mais jamais intimidante grâce au soin porté à l’accueil et au confort) qui se prolonge dans les salons feutrés du rez-de-chaussée, soulignés d’un long bar où s’alignent des flacons d’exception.

Tour du propriétaire

Pour célébrer le génie Lalique, Silvio Denz a également enrichi la villa d’un ovni architectural… Un pavillon de brique et de verre au toit végétalisé, signé de l’architecte Mario Botta, où prend place le restaurant. Du grand spectacle que l’on découvre, ébloui, dès l’entrée... D’un côté, les immenses baies vitrées dévoilent un tableau vivant où s’élancent les châtaigniers, les cèdres et les hêtres du parc, tous centenaires. De l’autre, la cuisine ouverte laisse apercevoir la brigade du chef Paul Stradner en plein travail, silencieuse et concentrée. C’est dans cette salle que l’on déguste la partition d’exception du chef autrichien, inspirée d’une promenade en forêt ou dans les allées du verger, autant que des richesses des marchés locaux.

Un retour aux sources qui se savoure sous la cascade de cristal d’un somptueux lustre, tandis que les tables se parent de verres et de carafes qui célèbrent le raffinement de la maison. La carte des vins est à l’unisson, conçue par l’Alsacien Romain Iltis – Meilleur sommelier de France 2012 – qui invite aussi ses hôtes à une découverte rare : celle de la spectaculaire cave qui abrite plus de 20 000 bouteilles, le tout veillé à l’entrée par une ultime œuvre du maître verrier.

De la villa au musée

Les passionnés du verre ne rateront pour rien au monde le musée Lalique. L’occasion d’une immersion dans l’œuvre du maître avec 650 œuvres qui retracent son incroyable parcours, de la joaillerie à la parfumerie, de l’art de la table aux vitraux des chapelles. Le lieu expose dessins et photographies et propose une vidéo qui dévoile les grandes heures de l’Exposition universelle de 1900 de Paris. Le maître y connut ses premiers succès avec des sculptures Art nouveau en bronze (dont sa fameuse Femme ailée), qui fascinèrent alors le monde entier.

Musée Lalique
40, rue du Hochberg, 67290 Wingen-sur-Moder

Marc Larminaux, directeur artistique et de la création chez Lalique

Comment mêlez-vous esprit historique et modernité dans vos créations ?

Marc Larminaux : Je m’inspire des archives de la maison tout en apportant un regard contemporain. Notre dernière collection « Empreinte animale » en est une parfaite illustration. Hommage aux empreintes de textures naturelles (plumes, feuilles...) utilisées par Lalique, elle apporte un nouveau souffle, avec un design et des techniques très contemporains. Réalisé en cristal pressé, le vase Croco reprend ainsi la texture de la carapace du crocodile, avec une grande minutie dans le découpage des écailles, ce qui constitue un tour de force. Le résultat est d’un réalisme saisissant.

Quelles pièces historiques peut-on encore admirer ?

M. L. La Villa abrite plusieurs œuvres signées Lalique : les vases Bacchantes ou Mossi des années 20 et 30 ou encore la coupe Champs-Élysées de 1951. Elles se mêlent naturellement à des pièces contemporaines, comme cette série de carafes exposées au bar, dans le cadre de notre collaboration avec la maison de whisky The Macallan. L’une reprend la texture du bois des fûts ; une autre évoque la forme d’une goutte de whisky…

Vous exposez aussi des œuvres d’artistes contemporains, et de maisons de luxe...

M. L. Le spectaculaire lustre du restaurant est signé Windfall ; les panneaux de papillons en cristal sont l’œuvre de Damien Hirst. Le jardin abrite une sculpture du designer Arik Levy avec une version en cristal, de petite taille, exposée dans le lobby de l’hôtel. Notre façon de prolonger la passion de René Lalique pour l’art et l’avant-garde…