Le design au service de l’expérience gastronomique
Sylvie Berkowicz | 25/11/2024 09:59
Faire vivre une expérience. Le mot est sur toutes les lèvres des chefs de la gastronomie. Et pour y parvenir, ils ne lésinent pas sur les moyens, car tout contribue à faire du repas un moment exceptionnel, y compris en invitant à la table d‘autres disciplines.
En octobre dernier, Dom Pérignon a proposé aux gastronomes des dîners immersifs, visant à faire interagir son univers avec celui de la gastronomie – une idée pas si nouvelle –, tout en intégrant un troisième champ artistique : le design culinaire. Julie Rothhahn, en posant son regard de designer sur le comestible, a collaboré étroitement avec le chef Amaury Bouhours (Le Meurice) et le chef de cave Vincent Chaperon. Ensemble, ils ont ajouté une dimension visuelle et sensorielle à ces dîners, conçus pour accompagner la sortie du Dom Pérignon Vintage 2015.
Sous les dorures d’une salle du Meurice, une longue table encadrée d’écrans accueillait ces repas, mêlant surprises gastronomiques et artistiques dans une fusion harmonieuse de disciplines complémentaires. L’expérience, dans une version plus modeste, se prolonge jusqu’à fin décembre à la Table du Chef.
Rencontre avec Julie Rothhahn, laquelle intervient autant pour des évènements qu’auprès de chefs afin de les aider à construire chez eux, une « expérience » cohérente, en y mettant aussi du sens.
Quel a été le mandat pour ce projet ?
Julie Rothhahn : J'ai répondu à un appel à concours lancé par l’agence en charge du projet. Il s’agissait d’établir un rapport entre la création plastique et l'élaboration d'un vin : le champagne. J'ai déjà exploré énormément de pistes qui me semblaient extrêmement intéressantes, la première étant la question de la plasticité, de la forme, puis l’exploration de la notion de déconstruction. C'est-à-dire que, lorsque l'on crée une œuvre plastique, on dispose d'une toile, de pigments, de pinceaux. Quand on crée un champagne, on a un terroir, un sous-sol, des cépages, un climat… des éléments qui se combinent pour aboutir au vin. Ensuite, il y a la part de mystère, autrement dit ce qui se passe quand un esprit créatif y appose sa main. Il le fait de manière maîtrisée, mais avec une certaine part de hasard. C'est également ce qui se produit lorsqu'on laisse le raisin partir en fermentation. C'est un processus que l'on essaye de maîtriser, mais qu'on ne contrôle pas totalement non plus. Il existe là un mystère qui devient quelque chose de beau quand il est réussi. Enfin, il y a la notion d'assemblage, là où l’on est véritablement en maîtrise de son médium, où l’on compose à partir de ce que la nature nous a donné.
Votre métier de designer, est-il donc de mettre en forme toutes ces notions ?
Oui, mais d’abord de les penser. Et puis de m’entourer d’autres talents comme le graphiste Adrien Cuingnet du studio Plastac et Arsène Lefrançois, designer sonore du studio 31DB, mes comparses de création. Parce que tout ça ne passe pas forcément par la matérialité. Je suis plus sur une matérialité des sens, une synesthésie, où on a à la fois de l'image, du toucher, du son et du palpable. Il s’agit de mettre tous les sens en exergue et ajoutant du sens sur les sens qu'on va solliciter.
Comment s’est passé la collaboration avec Amaury Bouhours ?
Je suis venue avec le storytelling : ce rapport entre plasticité et élaboration du champagne. Puis on a échangé, rebondissant l’un sur les idées de l’autre. Il par exemple exprimé au niveau de l'assiette cette notion de déconstruction dont j’ai parlé, en proposant un ingrédient décomposé de différentes façons pour en avoir une autre perception. C'est ce qu'on a pu faire avec l'araignée de mer qu’il a rendu liquide, moelleuse, onctueuse, alors qu’elle est fibreuse quand elle est dans la patte. On en donne une interprétation la plus complète possible, mais aussi très onirique. Ca a été un vrai plaisir cette collaboration !
Cette discipline du design culinaire qui est née il y a 15, 20 ans, comment a-t-elle évolué ?
Elle a selon moi, pris une dimension vraiment importante, parce que les chefs ont arrêté d'avoir peur de ce qu'on peut leur apporter, sans entrer en compétition avec eux.
Ils sont beaucoup plus ouverts à un travail de fond sur le message qu'ils veulent transmettre, sur leur ADN qu'en tant que designer on aide à définir et à travailler.
Ça leur permet d’avoir un certain recul, de les éclairer sur les aspects de leur cuisine qu'il est intéressant de mettre en lumière. Puis de générer un fil conducteur cohérent dans tout ce qu'ils produisent : la salle, le service, la gastronomie, les matières, les couleurs, le son. Une dégustation peut tellement changer en fonction de son contexte. Une boisson que vous allez goûter au soleil couchant à Bali aura un goût particulier, qui ne sera pas du tout le même à Paris un jour de pluie ! C’est donc hyper important d’intervenir sur tous les éléments. Je sens que aussi les marques ont compris qu’allier gastronomie et design peut être un outil ultra puissant de pensée et de transmission. On touche vraiment les gens dans leur intimité, on leur fait goûter des choses, mais on leur fait aussi entendre et voir des choses. Quand on sait manier ces éléments, on les touche fortement, et c'est très intéressant pour délivrer un message.
Jusqu’à fin décembre à la Table du Chef (entre 2 et 8 convives maximum)
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