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Le hareng : retour en première ligne

Le hareng : retour en première ligne

27/02/2018

Ce poisson populaire des mers froides reconquiert les assiettes des restaurants, portée par la vague des néo-bistrots, mais aussi par son côté « bon pour la santé ». À (re)-déguster absolument. Par Jean-Louis Galesne.

V

oilà un poisson gras qui ne mérite pas le mépris où on le tient. Il possède un nombre incalculable de vertus : il contient toutes les protéines complètes nécessaires, il est riche en oméga 3, il aide à la diminution des risques de maladies cardiovasculaires, et une portion de 100 g couvre la totalité de l’apport nutrionnel journalier. On ajoute qu’il est facile à cuisiner et le portrait frise l’idéal. Disons surtout qu’il vaut la peine de le connaître mieux.


Le hareng se pêche d’octobre à janvier dans toutes les mers froides : mer du Nord, Baltique... Il est de la même famille que la sardine, le sprat et l’alose, les clupeidae, et il se déplace par grands bancs. Il mesure entre 25 et 40 cm et se nourrit de plancton, de crustacés, et de poissons. On trouve des traces de son existence dans les textes dès l’Antiquité, mais il connaît son heure de gloire au Moyen-Âge, quand les Anglais le surnommèrent king herring. En France, il a assuré une partie de la subsistance des ports de la Côte d’Opale, petits et grands, Boulogne-sur-Mer, Staples-Sur-Mer... Même si aujourd’hui, son importance est moindre.



Côté cuisine, il faut éviter de le manger cru, par précaution. La cuisson à la vapeur est celle qui lui conserve le mieux ses qualités nutritionnelles. Pour ceux qui l’aiment fumé ou saur, la référence est l’entreprise J.C David à Boulogne-sur-Mer. Cette maison fait un travail exceptionnel de manière traditionnelle, y compris pour les rollmops aux baies de genièvre de Wembrechies, et ses foie de lotte ou de morue. Chez J.C David, on saure les hareng et on les fume au bois de hêtre dans des fours à l’ancienne, après les avoir trempés un long moment dans de l’eau salée. Les meilleurs bistrots de France les achètent pour leurs fameux harengs pommes à l’huile.



Patron du 6 Paul Bert , un bistrot parisien couru de l’arrière-cour Bastille dans le 11e, Bertrand Auboyneau avoue adorer le hareng. Il le présente de plusieurs façons. De manière classique avec en dessous des rattes émincées, crème à l’aneth, et au dessus des œufs de saumon, « pour apporter un peu de craquant. » Il le prépare aussi dans une salade pommes de terre, coupées en carrés, et mélangées à des bulots, un ensemble lié avec une mayonnaise à l’aïoli. « Les clients adorent ! » 


Last but not least, en hiver, Bertrand affiche à l’ardoise un velouté de haricots blancs, espuma de harengs. À L’Écailler du Bistrot (Paris 11), un de ses autres établissements, il propose aussi une salade de harengs, concombre, courgettes, et groseille. Il met aussi à l’ardoise régulièrement des rollmops qu’il achète, servis avec du gros concombre doux et de la crème au raifort.


En Scandinavie on ne consomme plus de hareng de la mer Baltique, trop polluée, lui préférant celui originaire d'Islande

Peter Thulstrup, Danois formé à La Tour d’Argent et au Crillon, joue le hareng à la scandinave dans son bistrot chic, La Petite Sirène de Copenhague (Paris 9). Peter rappelle qu’ au Moyen Âge, le hareng, alors de la Baltique, servait tout à la fois d’aliment et de moyen de paiement au Danemark.
En Scandinavie aujourd’hui, on ne consomme plus du hareng de la mer Baltique, trop polluée, mais d’Islande. Une fois pêché, il est mis dans un tonneau de gros sel pendant 24 mois, pour le nettoyer de ses impuretés, puis il est dégorgé et dessalé. « En Scandinavie, on travaille toujours le hareng en aigre-doux, dans le sucre et le vinaigre », précise Peter. 


À La Petite Sirène, il reçoit les harengs dans une marinade à l’ancienne plus onéreuse, mais plus goûteuse. Il les travaille de manière classique, au curry, mais avec une base de yaourt ou au raifort. Il réduit la marinade avec sucre, sel, vinaigre, laurier, oignons, il la refroidit, et il termine avec de la crème et du raifort frais. Pour ses harengs à la betterave rouge, même process pour la marinade, auquel le chef ajoute une brunoise de golden. « Le hareng est dans notre ADN », dit avec un large sourire Peter. Mais le hareng n’est pas de la fête seulement au royaume du Danemark, il l’est aussi à Étaples-sur-Mer chaque année en novembre. Il est alors mangé, grillé, fumé, mariné, en soupe... Preuve que hareng rime facilement avec content.


Texte : Jean-Louis Galesne

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