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Le cidre de glace, une douceur normande à découvrir

Le cidre de glace, une douceur normande à découvrir

Né au Québec dans les années 1990, le cidre de glace concentre le sucre et la mémoire des pommes. En Normandie, il s’invente une nouvelle histoire, entre hasard heureux et savoir-faire patient.

Emilie Lesur Publié le 29/10/2025 à 15:37

Imaginez un cidre qu’on laisse geler. L’eau se fige en glace. Le sucre et l’alcool restent liquides. C’est tout le secret du cidre de glace : un procédé inspiré des hivers québécois, là où les pommes gèlent sur l’arbre avant d’être pressées. Depuis 2014, au Canada, l’appellation « cidre de glace » est protégée par une IGP. En Normandie, où les gelées arrivent trop tard, les producteurs ont adapté la méthode.

Un précieux nectar

Au Pressoir d’Or, près d’Évreux, la pomme est une histoire de famille depuis plus de trente ans. Margaux Doré, fille du fondateur, a repris la main sur la communication et la commercialisation il y a dix ans. Elle raconte : « Au départ, l’idée était de créer un apéritif original avec un process différent de fabrication, pour se démarquer du pommeau ou du calvados. On s’est lancé en 2014 avec une quinzaine de producteurs. À ce moment-là, on avait la même bouteille, la même étiquette, vraiment le même packaging pour tout le monde, ce qui a permis de faire quelques petites économies d’échelle et lancer le produit. »

Le procédé est artisanal : on congèle de grandes cuves de cidre en cours de fermentation à environ 3 ou 4° d’alcool, puis on récupère la partie liquide concentrée en alcool et en sucre. « Comme on congèle, on perd le gaz, donc on obtient un produit plus liquoreux, non pétillant et plus alcoolisé entre 12 et 13°. » Le résultat est précieux : 800 litres de cidre pour un petit 200 litres seulement de cidre de glace. « C’est aussi pour ça que la bouteille se vend plus », confie-t-elle. Entre le ramassage et la mise en bouteille, dix mois sont nécessaires. Quant au choix du cidre de base, c’est le père de Margaux, Éric Doré qui sélectionne la cuve selon le goût. « On regarde le taux d’alcool, le taux de sucre, et on aime bien que le produit soit équilibré, pas trop d’amertume, pas trop sucré, ni trop fruité. On part en général sur un demi-sec. »

Il arrive qu’une erreur offre de douces perspectives. « Il y a deux ans, on avait oublié de garder du cidre classique pour le congeler. Il ne restait que du cidre rosé, qui est fait avec une pomme rouge, assez acidulée. Plutôt que de ne pas faire de cidre de glace, on a tenté avec le rosé, et on a obtenu un cidre de glace rubis, à la couleur rouge fuchsia et aux notes acidulées, presque cerise. On était ravis du résultat, et il a même décroché une médaille d’or aux Vinalies, concours international, en 2024. » Cette improvisation est devenue une nouvelle tradition : chaque année, le Pressoir d’Or refait ce cidre inattendu, preuve que l’artisanat a parfois besoin d’un peu de hasard.

Cidre De Glace © Dr
© DR

Un cidre qui ne laisse pas indifférent

Le cidre de glace reste un produit de niche. « Clairement, ce n’est pas un produit de volume », admet Margaux. On le trouve surtout au moment des fêtes, parfois sur les cartes de restaurants, comme Le Cappeville (1 toque) à Gisors, dans quelques supermarchés ou hôtels curieux, tels que le Bel Ami à Pacy-sur-Eure ou La Musardière à Giverny.

Quand il arrive sur une table, il surprend. Concentré, liquoreux, fruité, il rappelle un vin moelleux. « On conseille de le boire frais, seul, ou bien avec du foie gras. Ça fonctionne aussi très bien avec des fromages persillés », explique Margaux. Le cidre de glace ne laisse pas indifférent. Certains l’adorent, d’autres passent leur chemin. Mais tous ceux qui le goûtent reconnaissent sa singularité. « Tous les jours, des clients nous demandent ce que c’est. »

Pas encore protégé en France, ce cidre rare porte pourtant la promesse d’un terroir qui sait se réinventer. Entre patience, hasard et tradition, il offre une autre façon de redécouvrir la pomme : douce, concentrée, et d’une élégance discrète.

Le Pressoir d’Or

  • Où ? 57, route des Andelys, Saint-Jean de Frenelles, 27150 Frenelles-en-Vexin
  • Boutique ouverte du lundi au vendredi de 9h à 12h et de 14h à 18h, et le samedi de 14h à 18h
  • Tél : 02 32 69 41 25
  • www.pressoirdor.com
Cet article est extrait du guide Normandie 2026. Celui-ci est disponible en librairie et sur le e-shop Gault&Millau.
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