48 heures à Avignon
Provence-Alpes-Côte d'Azur - Corse - Monaco/2025
Balayée par le soleil et le mistral, la Cité des papes invite à la balade dans son décor théâtral. Elle offre bien des trésors à qui sait regarder. Rien ne sert de courir, ici, on prend son temps.
Ils étaient neuf et ont fait d’Avignon une cité rayonnante. De 1309 à 1418, neuf papes se sont succédé dans le majestueux et imposant Palais des papes. Incontournable, la visite laisse voir, dans un certain vertige, toute la démesure architecturale de ce lieu de pouvoir. En sortant de là, un détour par le XVIIIe siècle de La Mirande invite à retrouver ses esprits devant une glace, un thé ou un déjeuner dans le jardin plein de charme. Les heures y filent gaiement et font oublier les musées de la ville. Le plus proche, le Petit Palais, se rappelle à nous. Ses peintures religieuses du Moyen Âge et de la Renaissance ont quelque chose de follement contemporain par l’intensité de leurs couleurs. On s’enivre de cette beauté qui, ici, embrasse la spiritualité.
Avignon remplit les âmes, mais n’oublie pas les ventres gourmands. Aux halles, les 40 stands du marché couvert s’animent les matins, surtout le week-end. Tomates écarlates, olives délicieuses, pélardons à point… On les butine avant de les grignoter au comptoir ou à la table de La Source des Halles. C’est à la bonne franquette, au coude-à-coude avec des touristes hollandais et des Marseillais bons vivants. On flâne ensuite dans le dédale de ruelles où la beauté s’impose encore, mais joue à cache-cache. Par-delà les murs des hôtels particuliers, les joyeux chants d’oiseaux trahissent des jardins secrets. Quant aux boutiques, elles révèlent parfois des surprises. De l’extérieur, Vox Populi ne laisse rien présager de ses volumes et de sa sublime verrière qui abrite l’univers poétique de l’artiste Pascale Palun. On y déniche des objets pour la maison. CQFD, un magasin dédié au « made in France » de la mode à la maison, partage son espace avec un restaurant et une salle de yoga. La « boulangerie utopiste » Bella Ciao, aux pains bio et levain naturel, n’ouvre qu’à 10 h pour éviter à ses artisans le travail de nuit, un détail qui surprend toujours les Parisiens en goguette.
Eh oui, Avignon sait vivre. Ses nouvelles adresses redynamisent le centre-ville qui s’éteignait lentement. Ainsi de la boutique De la Terre et des Feuilles proposant des thés et tisanes exceptionnels ; la cantine de quartier, Kouk, ouverte du petit déjeuner au goûter tardif ; ou encore l’Atelier Floral Lara Hollebecq. Ses délicates fleurs françaises (principalement du Var) sont emballées dans du papier tamponné de vers de Paul Verlaine. Ses horaires s’étirent le dimanche matin quand la place des Carmes se remplit de chineurs venus au marché aux puces. Le quartier, encore préservé des groupes de touristes, est l’un des plus vivants de la ville. Les étudiants de l’école internationale de théâtre Jacques Lecoq n’y sont pas étrangers. Ils attendent impatiemment le Festival d’Avignon, fondé en 1947 par Jean Vilar, et le fameux « Off ». La ville entière se transforme alors en scène géante – cours de lycée, gymnases, églises et carrières inclus.
« Avignon vit frénétiquement l’été. Aucune autre ville, en France, ne connaît cette saisonnalité. C’est très singulier, résume François Quintin, directeur de la formidable Collection Lambert, animée de belles expositions d’art contemporain. Le reste de l’année est plus calme malgré les autres festivals. » 2025 accueille une programmation spéciale
pour Avignon, Terre de Culture. Au menu, la réouverture des Bains Pommer de style Belle Époque. Ce nouvel espace muséal présentera les pratiques d’hygiène des deux derniers siècles. L’artiste Jean-Michel Othoniel y installera une partie de ses 200 œuvres lors de sa grande exposition temporaire, du 28 juin au 4 janvier.
En attendant, extra-muros et à trois stations de tram de la gare, l’Atelier Shed ouvre ses portes sur rendez-vous. Plusieurs artistes s’y sont rassemblés, dont le touche-à-tout Pablito Zago. Il présente son travail coloré et graphique mis en pratique sur des étiquettes de vin, des peintures murales ou encore des horloges… Envie de nature ? On enfourche un vélo vers les 700 hectares de l’île de la Barthelasse, la plus grande île fluviale d’Europe. À la ferme La Reboule, les frères Cappeau, troisième génération d’agriculteurs, y cultivent des fruits et légumes qui regardent, en poussant, le pont d’Avignon. On y fait ses emplettes avant de regagner l’intra-muros. Là, à l’heure de l’apéritif, les terrasses s’animent de voix et de rires autour d’un pastis ou d’un rosé bien frais. La ville commence lentement à résonner du claquement des volets en bois qui se ferment. C’est un tombé de rideau, annonciateur de la nuit.
